Voyager on n’en revient jamais. Je vous écris pour prolonger l’instant, en garder une trace, tordre le cou à la fugacité.

« Chaque pas est une respiration consciente. Chaque respiration
est un retour à soi. »
Marcher
en pleine nature est une pratique simple, accessible à tous, mais
incroyablement régénératrice.
Quoi
de mieux que la marche pour explorer le monde et se reconnecter à soi-même ?
Cet acte, à la fois banal et essentiel, accompagne notre existence depuis
toujours. Nous marchons comme nous respirons : naturellement, sans y penser… et
pourtant, quels bienfaits cela apporte-t-il vraiment à notre santé et à notre
esprit ?
Dans
nos vies modernes, où tout va toujours trop vite, prenons-nous encore le temps
de marcher simplement pour le plaisir ? La société dans laquelle nous vivons
ressemble à un marathon incessant, où nos corps et nos esprits sont happés par
un flux constant d’informations et d’obligations. Nous oublions la motricité
naturelle qui nous est donnée, ce que notre corps est capable de réaliser.
Depuis toujours, la marche accompagne l’être humain. Elle nous a
permis de nous déplacer d’un point à un autre, de travailler, de nous nourrir
et d’accomplir des tâches essentielles à notre survie. Aujourd’hui, elle ne se
limite plus à ces nécessités : nous marchons aussi pour nous détendre, nous
amuser, explorer et profiter pleinement de la nature.
Reprendre
le temps de marcher, et surtout de le faire en pleine conscience, peut devenir
un véritable refuge. La marche est souvent décrite comme un remède doux contre
l’anxiété et la dépression, mais comment agit-elle réellement sur notre esprit
?

Combien de Français marchent réellement ? Selon l’étude de l’INJEP
(Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire) sur les « sports
de nature » en France, publiée en 2020, la randonnée pédestre est l’activité de
nature la plus pratiquée, bien que le pourcentage exact de Français ayant
effectué au moins une sortie dans l’année ne soit pas précisé de manière
claire. La Fédération française de la randonnée pédestre (FFRandonnée) apporte
davantage de précisions : elle indique que 56 % des Français de plus de 18 ans,
soit environ 27 millions de personnes, ont déclaré pratiquer la randonnée
pédestre ou la marche loisir au cours des douze derniers mois. Cette pratique
est en forte progression, puisqu’elle est passée de 37 % en 2014 à 56 % en
2021, soit une augmentation de 19 points. Le baromètre « Sports et loisirs de
nature » de 2016 précisait, quant à lui, que 35 % des Français âgés de 15 à 70
ans avaient pratiqué la randonnée pédestre au moins une fois dans l’année. On
peut donc estimer qu’aujourd’hui environ 50 à 60 % des adultes français
marchent régulièrement pour le loisir.
En ce qui concerne les distances parcourues, elles varient
considérablement selon le type de randonnée, le niveau du randonneur et le
terrain. Sur plusieurs jours et par temps agréable, la distance moyenne se
situe généralement entre 16 et 32 km. Pour une randonnée de niveau moyen, il
est courant de parcourir 15 à 20 km par jour.
La randonnée pédestre peut également représenter un effort
physique significatif. Selon la FFRandonnée, marcher sur terrain plat à rythme
modéré, environ 4 km/h, équivaut à brûler entre 100 et 200 kcal par kilomètre.
Ainsi, parcourir 4 km en une heure pourrait correspondre à 400 à 800 kcal, bien
que ce chiffre dépende du terrain, du poids du randonneur et du sac à dos. Pour
être prudent, on peut estimer qu’une heure de randonnée à rythme modéré sur un
terrain facile brûle en moyenne entre 250 et 400 kcal, voire davantage selon
l’effort fourni et le dénivelé.
Enfin,
les Français randonnent pour des raisons diverses et complémentaires. La
randonnée est perçue comme un moyen d’améliorer sa santé et son bien-être, de
se reconnecter à la nature et de prendre du temps pour soi. Elle permet
également de partager des moments avec d’autres, de se dépasser, ou encore de
vivre une rupture biographique ou un changement de vie. Selon la FFRandonnée, 46
% des pratiquants déclarent marcher au moins une fois par semaine. Atout France
souligne par ailleurs que le nombre de séjours de randonnée a augmenté de 25 %
au cours des dix dernières années, un phénomène en partie motivé par le besoin
croissant des Français de se reconnecter à la nature.
Gregory
N. Bratman, chercheur à l’Université de Stanford, a étudié les effets de la
marche en nature sur la rumination mentale, un
processus de pensées répétitives souvent négatives et centré sur soi, considéré
comme un facteur de risque pour la dépression. Son objectif était de déterminer
si une exposition à la nature pouvait réduire cette rumination et influencer
l’activité cérébrale associée.
Pour cela, les chercheurs ont comparé deux types de marche : dans
un environnement naturel, avec prairies et arbres, et dans un environnement urbain
très fréquenté, avec routes et trafic dense. Les participants, tous en bonne
santé, ont effectué une marche de 90 minutes dans l’un ou l’autre cadre. Avant
et après la marche, plusieurs mesures ont été prises : l’auto-évaluation de la
rumination via un questionnaire, ainsi que l’activité dans une zone spécifique
du cerveau appelée cortex préfrontal sub-génual (sgPFC),
connue pour être impliquée dans la rumination et la dépression. Certains
paramètres physiologiques, comme le rythme cardiaque et la respiration, ont
également été contrôlés, bien qu’ils ne constituent pas le cœur de l’étude.
Les résultats ont été significatifs : les participants ayant
marché en nature ont montré une diminution notable de la rumination
par rapport à ceux ayant marché dans un environnement urbain. L’activité dans
le sgPFC a également diminué après la marche en nature, suggérant un mécanisme
neurologique possible expliquant ce bénéfice. En revanche, la marche en ville
n’a produit aucune réduction significative de la rumination ni de
modulation de l’activité cérébrale dans cette zone.
Cette étude indique que même une exposition relativement courte à la
nature, de 90 minutes, peut aider à réguler les pensées
négatives récurrentes et à influencer l’activité cérébrale liée à ces pensées.
Elle soutient également l’idée que les environnements urbains densément bâtis,
moins naturels, pourraient augmenter le risque de troubles mentaux via des
mécanismes tels que la rumination. Pour les urbanistes et décideurs, ces
résultats soulignent l’importance des espaces verts et des parcours dans la nature,
qui peuvent agir comme de véritables « infrastructures » de santé mentale.

La marche méditative consiste à marcher lentement, délibérément et
en silence, en portant une attention consciente à chaque pas. Il s’agit de
ressentir le contact des pieds avec le sol, d’observer le rythme de sa
respiration et les sensations corporelles, tout en laissant les pensées passer
sans jugement pour revenir doucement à la marche. L’objectif n’est pas
d’atteindre une destination, mais de vivre
pleinement chaque instant et chaque mouvement.
Cette pratique trouve ses racines dans le bouddhisme et a été
particulièrement popularisée en Occident par le moine Thích Nh?t H?nh. Elle
s’inscrit dans la démarche de la pleine conscience, ou mindfulness, qui
consiste à vivre l’instant présent sans jugement.
Pour pratiquer la marche méditative, il est conseillé de choisir
un lieu calme, comme un jardin, un parc, un couloir, ou même un salon. Il
convient de se tenir debout quelques instants, de respirer profondément, puis
de commencer à marcher lentement en observant attentivement la sensation du
pied qui se lève, avance et se pose, le contact avec le sol, la respiration,
ainsi que les sons, les odeurs et la lumière autour de soi. Si l’esprit
s’évade, ce qui est naturel, il suffit de revenir doucement à la sensation du
pas. Après quelques minutes, on peut s’arrêter, respirer profondément et
ressentir de la gratitude pour ce moment de présence.
La marche méditative permet de développer la conscience corporelle
et la présence à soi, d’améliorer la concentration et la stabilité
émotionnelle, de renforcer le sentiment de paix intérieure et de gratitude, et
de favoriser une reconnexion à la nature ainsi qu’à la simplicité de l’instant.

La marche en pleine nature ne se limite pas à une simple activité
physique : elle exerce également des effets positifs sur la gestion des
symptômes de maladies chroniques. De nombreux témoignages de patients ayant
intégré la randonnée à leur quotidien le confirment, et les études
scientifiques viennent corroborer ces observations.
Mais le plus important se trouve dans notre esprit. La marche agit
comme un baume apaisant, permettant de ralentir, de se retrouver et d’alléger
nos pensées les plus encombrées. Explorer la nature, se projeter dans des
espaces vastes et infinis que notre vie à cent à l’heure ne nous laisse plus le
temps de contempler, procure un sentiment de paix et de légèreté. Elle
contribue à diminuer l’anxiété, à combattre la dépression et à améliorer
l’humeur.
Pour aller plus loin, la marche peut devenir un véritable outil de
pleine conscience, appelée marche méditative. Cette
pratique consiste à marcher lentement et consciemment, en portant toute son
attention sur l’expérience du moment présent, le corps, la respiration, les
sensations et l’environnement. C’est une manière de méditer en mouvement,
accessible à tous, même à ceux qui ont du mal à rester immobiles pour méditer
assis.
La nature elle-même joue un rôle clé dans ces bienfaits. La
diversité des paysages et la richesse des stimuli sensoriels stimulent notre
concentration et notre créativité. Marcher dans un environnement naturel plutôt
qu’urbain favorise la clarté mentale et ouvre l’esprit à de nouvelles idées.
Elle agit comme une remise à zéro cognitive, apaise la fatigue mentale et
permet de stimuler l’attention et l’imagination.
La marche réduit également le stress et l’anxiété. Elle favorise
la libération d’endorphines, hormones du bien-être, et aide à réguler le
cortisol, hormone du stress, surtout lorsqu’elle se pratique en forêt, en parc
ou au bord de la mer. Le rythme régulier de la marche et la respiration
synchronisée induisent un état méditatif proche de la pleine conscience.
La marche améliore l’humeur et peut prévenir la dépression. Des
études montrent que 30 minutes de marche par jour peuvent réduire les symptômes
dépressifs autant que certains traitements légers. La marche stimule la
production de sérotonine et de dopamine, neurotransmetteurs liés au plaisir et
à la motivation. Marcher, surtout en groupe, rompt l’isolement et soutient le
moral.
Elle stimule aussi la clarté mentale et les capacités cognitives.
Le mouvement régulier augmente la circulation sanguine vers le cerveau,
améliorant la concentration, la mémoire et la créativité. Une simple balade
peut faciliter la réflexion et la résolution de problèmes, d’ailleurs, de
nombreux penseurs célèbres, comme Aristote, Nietzsche ou Steve Jobs, marchaient
pour réfléchir. La marche contribue également à ralentir le déclin cognitif
avec l’âge.
La pratique régulière renforce l’image de soi et la confiance. Atteindre
de petits objectifs, comme marcher 20 minutes ou réaliser un parcours plus
long, procure un sentiment d’accomplissement et de contrôle sur son corps et sa
vie.
Enfin, marcher en plein air améliore le sommeil et favorise la
récupération psychique. Une activité douce en journée régule le rythme
circadien et permet un sommeil plus profond et réparateur, essentiel pour la
santé mentale. L’exposition à la nature réduit la rumination mentale et
favorise la pleine conscience, tandis que le contact avec les éléments naturels
procure un sentiment de calme, de connexion et d’humilité face au monde.
En résumé, marcher, c’est autant soigner son esprit que son corps.
C’est un moyen simple, gratuit et accessible pour retrouver équilibre, sérénité
et énergie mentale.
INJEP - Rapport 2022 sur les sports de nature : https://injep.fr/wp-content/uploads/2022/02/rapport-2022-06-Sports-de-nature.pdf
INJEP - Baromètre national des
pratiques sportives 2024 : https://injep.fr/publication/barometre-national-des-pratiques-sportives-2024/
FFRandonnée - Résultats sondage
national 2021 : https://www.ffrandonnee.fr/Media/Default/Documents/federation/espace-presse/cp-ffrandonnée-la-randonnée-pédestre-et-moi-resultats-sondage-national-2021-17032022.pdf
FFRandonnée - Sondage « La
randonnée et moi » déc. 2021 : https://www.ffrandonnee.fr/Media/Default/Documents/federation/Sondage-la-randonnee-et-moi-Union-sport-et-cycle-pour-la-FFRandonnee-déc-2021.pdf
FFRandonnée - Rapport d'activité
2022 : https://www.mongr.fr/data/1000/Files/Emailing/rapport-activite-ffrandonnee-2022.pdf
FFRandonnée - Article sur les 27
millions de pratiquants : https://www.ffrandonnee.fr/s-informer/actualites/avec-27-millions-de-pratiquants-la-randonnée-est-le-sport-le-plus-pratique-en-france?utm_
Atout France - Clientèles du
tourisme de randonnée pédestre 2019 : https://pro-tourismeloiret.com/wp-content/uploads/2019/07/Atout-France-Mars-2019-randonnee_pedestre_optimise.pdf
Ministère des Sports - Données
sports de nature : https://www.sports.gouv.fr/data-640
https://news.stanford.edu/stories/2015/06/hiking-mental-health-063015?utm
https://publichealth.jmir.org/2024/1/e48355/?utm
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/39045858/?utm
https://washingtonpost.com/fixating-or-brooding-on-things-take-a-walk-in-the-woods-for-real/2015/06
/29/94e5d24e-ba91-4bbd-91db-5e1bd3460613_story.html?utm_
https://link.springer.com/article/10.1007/s12144-023-05112-z?utm
https://www.webmd.com/fitness-exercise/mental-benefits-of-walking%23%3A~%3Atext%3DWalking
%20helps%20boost%20your%20mood%2Cresponsible%20for%20your%20stress%20response.?utm
https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC11287235/?utm
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26124129/?utm
https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1510459112?utm
https://stanforddaily.com/2015/07/26/researchers-find-walking-in-nature-provides-mental-health-ben
efits/?utm
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